Lorsque ma démarche d’écriture a croisé l’épreuve du deuil, j’ai cherché obstinément comment écrire sans les mots.
J’ai
pensé, telle une réparation, travailler sur
l’action de repriser
les tissus que le temps avait déchirés, troués, le vide laissé.
J’ai trouvé, à
nu de mots, où tendre vers le dépouillement,
où situer l’interrogation permanente du lien, de l’absence, de
la mort - un ouvrage qui
se détisse // se brode, cicatrise
Processus en quête de dénuement et de silence / l’interruption dans la répétition / l’à-peine perceptible
"donner à rien, sous sa forme de rien la forme de quelque chose - ce quelque chose peut-il être une vie ?"
Engager le geste dans ce que l’existence impose - dépossession, dé-saisissement. Envisager le fil comme permanente impermanence, comme on se lie et se sépare des êtres et du monde
"nous devons renoncer à connaître ceux à qui nous lie quelque chose d’essentiel, nous devons les accueillir dans le rapport avec l’inconnu où ils nous accueillent nous aussi dans notre éloignement"
A partir de tissus de coton/lin blanc anciens, le geste minimal, lent qui retire fil après fil fait de l’absence un acte, crée une pensée corporelle de la dis-parition / dis-continuité et invite à un nouvel espace de cohabitation : lignes tangentes, absentes, autonomes, croisées, stèles
L’œuvre est fragile et demande une présence et un regard attentifs. C’est, en quelque sorte, un hommage aux disparus et à la vie. Là où notre solitude nous engage dans le monde
A dix ans, savoir qu'écrire - L'écriture est là, fragmentée, irrésolue. Elle est parfois dite, croise le geste, résonne avec le silence du tissu ou le demande à cor et à cri.
Le yoga, à la croisée de mon travail artistique, rejoint l’ascèse, la concentration et l’insatiable quête que celui-ci implique